Absolution, de Patrick Flanery

En ce moment je lis « Absolution » de Patrick Flanery. Ça se passe en Afrique du Sud où revient le narrateur après avoir fait ses études et commencé sa carrière aux Etats-Unis.
Et ça pose plein de question sur le « comment se comporter en terre si familière mais à la fois étrangère ? » Ce dialogue en est le reflet le plus parlant. Pauvreté-étrangeté-implication… Je crois que tout y est.

– Think of all the fuckers who only give them fifty cents and can’t be bothered. Money is’nt an insult. There’s nothing wrong with charity. Not everything has to be payment for services rendered, however informally. And if you’re a tourist you owe them a little more.

– I don’t think of myself as a tourist any more. I’m back now.

– You haven’t be local for a long time, Sam, no matter what shirt you wear or the music you listen to. And who’s to say you’re going to stay in the long run ? []

– But then you’ll go somewhere else. That means you’re a tourist. You don’t have to feel bad about it. Just remember it.

– And how much do you give ?

– No see, the thing is, I give less than I expect you to give because I give every day and have been giving for years. […] When I park in the city, I don’t give the car guards as much as I’d expect you to give because I give so much already, and even that isn’t enough, you know. And I don’t give food to people who come to the house any more, except the old man, because he’s never drunk. So I’m one of the fuckers I hate. But you tourist, you’ve got to give a little more.

Un poème pour une soirée plus douce

L’albatros de Charles Baudelaire

Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.

A peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l’azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à côté d’eux.

Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule!
Lui, naguère si beau, qu’il est comique et laid!
L’un agace son bec avec un brûle-gueule,
L’autre mime, en boitant, l’infirme qui volait!

Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l’archer;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.

Et j’approuve.

Personnellement, je ne vais pas au théâtre, au cinéma, pour qu’on me raconte ma vie – je la connais, merci – ou celle de mon voisin de palier – si j’en avais un je lui demanderai. Rien ne m’intéresse autant que d’élargir mon champ de vision, découvrir d’autres mondes, d’autres sensibilités, d’autres histoires, être touché par des choses qui ne me concernent pas

Ici et maintenant, Diastème

pour mes trente deux ans

De toute façon ça fait un moment que mon horloge intérieure est déréglée, et que j’affirme avoir 32 ans alors même que j’en ai 31. Il semblerait que j’ai l’horloge intérieure qui est un peu en avance. Ca ne me déplait pas, au contraire.

J’entre donc dans cette année avec un projet tout neuf, et une singulière envie de regarder dans le rétroviseur, et de voir comment ma vie a changé ces 12 derniers mois. Et avec étonnement, ne regretter aucune des décisions prises.

Des décisions difficiles à assumer, des mauvais moments, des questions existentielles, oui, mille fois oui. Des erreurs, oui, mille fois oui. des choses que je ferais différemment, sans doute.

Mais :

– un nouveau boulot

– une chouette histoire

– deux aller/retour pour aix en provence, un autre à venir (et une demi douzaine dans l’autre sens)

– un petit gamin aux yeux bleus qui rigole tout le temps

– un petit gamin aux yeux bruns qui fait des calins, et que je vois dès que j’en ai envie/besoin

– des liens qui se renforcent

– la fin d’une relation qui ne me rendait pas/plus heureuse

– du vin, du cognac, du champagne, de la gibelotte, de la soupe de carottes au gingembre, des saucisses de morteau et des mont d’or chauds

– les pandas de Chengdu, les pentes de Chongqing, la chaleur de Beijing et les voyages en train

– le grand William (Forsythe), le jeune Hofesh (Shechter), le spectacle au nom de chat et au goût d’exploit de James (Thierée), le scintillant Jacques (Gamblin)

– Jim Harrison, Terry Goodkind, David Nicholls, Juli Zeh, Nuala O’Faolain, Stéphane Hoffman, Nina Bouraoui, Hermann Hesse

– Pierre Lapointe, Aldebert, Miossec (compagnons de longues années), Marina and the diamonds, Regina Spektor, Nina Simone

Ouaip, ça ressemble à un billet bilan. mais allez voir Hofesh Schechter aux Abbesses, Doisneau à Paris, écumez le stand Sabine Wespieser au salon du livre, lisez Diastème, savourez Philippe Dumez. Nagez, marchez. Vivons et savourons.

 

 

bullshit 2.0

La saison à Chaillot s’annonce hyper prometteuse, Le tnp a été l’endroit de mes premiers émois théâtraux avec les petits cochons de Jérôme Savary, ça remonte à 25 ans et les souvenirs sont encore vifs. Ca me rappelle juste que j’ai un ptit gars à emmener au théâtre, histoire qu’il sache ce que c’est.

Cette saison à Chaillot il y aura 3 Forsythe (dont deux hors abonnement) avec mon grand amour Impressing the Czar. Et puis Russell Maliphant (« j’ai eu un orgasme quand j’ai vu son nom », m’a écrit avec enthousiasme le gars qui partage mon addiction), et puis le cirque Eloize et la Cie 14:20 (vue à la présentation du livre Fnac à la rentrée dernière) entre autres merveilles… Je tiens d’ailleurs un mail prêt avec mon résumé de saison, tellement ça m’est demandé ces derniers jours!

Je ne sais pas si je pourrai tout voir. Mais rien que la perspective d’autant de belles choses et de moments hors du temps me réjouit.

[Par contre au Rond-Point grosse déception, et à l’Odéon rien d’exceptionnel, mais ces deux institutions ont fait passer le message politique (servir la soupe pour le RP, et frustration pour l’Odéon) avant le message artistique durant leur présentation. Autant dire que Dominique Hervieu et José Montaldo, avec leur spectacle sur scène, un rythme de présentation enlevé et leur doublage en langue des signes ont frappé très très fort.]

Raptus, Diane Meur

C’est vrai que, dans la conversation, il n’avait pas encore témoigné d’une grande intelligence, mais pas non plus du contraire de l’intelligence. Il était manifestement bon; et peut-on être bon sans avoir, quelque part, une étincelle d’intelligence? Et puis il osait se taire, aussi. Voilà dix minutes qu’il ne parlait pratiquement plus. Il y a des gens qui ne savent pas se taire, pour qui se taire est une grossièreté, une faute, une anomalie…

Envies.

Comme un echo à Fabienne, le mois dernier j’ai choisi pour un ami très cher trois livres, pour trois décennies, dont une commune.

Alors j’ai choisi le Panama, de Janosch. En version originale, parce qu’ils quittent leur maison pendant longtemps, même s’ils finissent par y revenir.. Et leur maison est beaucoup mieux en revenant parce qu’ils ont un nouveau canapé. J’avais hésité avec Freunde, d’Helme Heine, mais celui là convient mieux au troisième de la troupe, alors… Denn Freunde träumen von einander.

Puis la vie mode d’emploi, parce qu’outre son titre formidable c’est un livre que j’aime d’amour, riche, foisonnant, plein de détails et de vérités. J’avais hésité avec Océan Mer de Barricco, mais ils ne l’avaient plus en librairie, et puis celui là aussi ira mieux à un autre ami cher.

Et enfin le tome 1 des notes de -Boulet-. Je suis consciente de lui avoir inoculé une drogue dure, un truc dont il ne pourra plus jamais se défaire, mais Hey, c’est fait aussi pour ça, les amis, non?

Je ne sais toujours pas quels sont les miens, de livres. Nuala O’Faolain, Christopher Hobsbawm, Isaac Asimov manquent notamment. Mais ceux listés là haut font partie intégrante de ma vie.

Forsythe, workwithinwork et quintett dansés par le ballet de l’opéra national de lyon

hey, les gens, allez voir Forsythe. Pas les pièces récentes, mais dans les archives vous avez des trucs, et ce qui se joue en ce moment au théâtre de la ville, je ne suis pas la seule à dire que c’est génial. Ce mec a écrit la danse comme il ne le fait plus lui même entre temps, berce le spectateur, l’irrite légèrement pour mieux le calmer, oppose le fluide aux pointes et maitrise le bruit des pas sur le plateau dans une synchronisation flirtant avec la perfection.

Et les danseurs de l’opéra de lyon, et cette litanie lancinante et répétitive; et le bonheur partagé d’être là, tous, standing ovation j’avais jamais vu ça. L’émotion pour 17 euros, on aurait tort de s’en priver. Quintett et Workwithinwork, si vous n’aviez pas été complets, je serais retournée vous voir.