J’ai pas mal entendu parler des histoires de famille, des secrets enfouis, des générations qui récupèrent le poids de celles qui précèdent. Je suis un peu dubitative, parce que du côté de ma maman, on a des histoires à la Chabrol, de sombres drames à base d’héritage, de prison, de maisons de famille partagées à la hussarde, de biens non constructibles avant décès qui soudainement sortent des zones inondables, de suicides, etc. Et rien. Que dalle. On vit avec, sans être traumatisés outre mesure (du moins dans ma partie de famille, celle que j’ai choisie).
Et puis du côté de mon papa, il n’y a plus grand’ monde. De la famille très éloignée, dispersée aux quatre coins du monde, avec une préférence pour l’Amérique du nord. Je pensais donc être épargnée.
Sauf que… Sauf que mon grand’pa, je ne l’ai pas connu, il est décédé deux ans avant ma naissance. Issu d’une vieille famille juive de Prusse immigrée en Alsace après 1870 (vous n’aurez pas l’Alsace et la Lorraine, qu’ils disaient…) l’allemand était sa langue maternelle, et la seule façon que mon papa avait de s’en rendre compte, c’est qu’il parlait latin avec un accent. Il y a encore 5 jours, on m’a prise pour une Allemande avant que je ne dise le nom de 3 rues parisiennes à la suite.
Il a choisi la France à ses 21 ans. C’est l’âge auquel j’ai fait aussi fait mes valises pour y revenir. Après mon premier long séjour… en Allemagne. J’ai rédigé mon mémoire de fin d’études dans sa langue maternelle, sur la base d’archives familiales qui traitaient.. de son cas.
et j’ai naïvement pensé en avoir fini avec cet inconnu à l’ombre pesante mais bienveillante. Avec mon ami F, on rigolait à l’idée d’avoir écrit tous les deux des mémoires thérapeutiques avant de rentrer dans le rang.
Jusqu’à ces jours-ci, où il y a un achat d’appartement, avec des sous qui proviennent de la vente de sa maison. Et puis dimanche, j’ai appris, mais en fait, je ne peux pas avoir passé 2 ans à travailler sur ces archives sans avoir vu passer cette date des dizaines de fois, et puis ce n’est pas moi qui ai choisi mais les vendeurs, et puis rien de logique n’explique, que l’on va signer pour cet appartement… le jour de l’anniversaire de mon grand’pa.
Et moi je vois ça comme un bon signe. Et je me traite de folle. Et je me fais traiter de folle, aussi.
J’m’en fiche. Je sais que c’est la bonne décision, et comme il n’est plus là pour le dire, je peux librement penser qu’il approuverait.
« et la seule façon que mon papa avait de s’en rendre compte, c’est qu’il parlait latin avec un accent »
J’aime.
Mais oui, ce sont de bons signes, en tout cas le fait que tu relèves, c’est signe que tu as envie d’y mettre un sens, et un sens positif, ce qui te fait du bien à toi, et les signes, au fond, ça sert à ça 😉
Moi aussi je fais partie du Club des Mémoires Thérapeutiques 😀